Le preneur qui a droit au versement de l’indemnité d’éviction est rapidement confronté à la question de son calcul. L’article L. 145-14 du Code de commerce la définit et rappelle que, principalement, elle se calcule selon les usages de la profession considérée.
Pour l’accessoire, sont pris en compte tous les frais nécessaires au déménagement et au réaménagement dans des locaux similaires pour le preneur (frais de déménagement, de licenciement, d’acquisition d’un droit au bail, de travaux, etc.).
Que comprend l’indemnité d’éviction ?
L’indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.
C’est ce que nous dit l’article L. 145-14 du Code de commerce. Cependant, il faut comprendre que l’indemnité d’éviction vient indemniser un préjudice, celui causé par le départ du locataire.
Aussi, la première question qui se pose est celle de la transférabilité du fonds.
Le fonds est-il transférable ?
En effet, si le fonds du locataire peut être transféré dans un autre local, dans une autre ville, sans perte de clientèle et donc de valeur, le préjudice sera diminué d’autant. Demeureront les frais accessoires de déménagement et de relocation.
C’est notamment le cas pour les commerces dont la clientèle ne dépend pas du lieu du local mais de la notoriété du client ou dont le local n’est pas prépondérant pour la bonne marche du commerce.
L’expert s’attachera donc à répondre à cette question dans un premier temps. Le fonds disparaîtra-t-il ou subsistera-t-il si le local change ?
La transférabilité dépend ainsi donc de la dépendance de l’activité au local considéré.
S’il existe un risque que le transfert induise une perte de chiffre d’affaires, l’indemnité d’éviction tiendra compte de cette perte à proportion de son ampleur. Si elle est totale, l’indemnité sera totalement réparatrice de la perte.
En revanche, si le bailleur justifie du fait que le lieu d'exploitation importe peu, l'indemnité versée ne sera qu’une indemnité de transfert qui couvrira les frais de déménagement, de licenciement, de réinstallation. Le montant du droit au bail sera ainsi pris en compte. Les tribunaux et cours jugeant que le locataire ne peut avoir à une indemnité d’éviction inférieure à celle du droit au bail des locaux loués.
Quelles sont les règles dans le cas de la vente par Internet ?
Si le fonds prévoit une vente en boutique et en ligne, les chiffres d’affaires réalisés en ligne seront déduits. Cependant, dans certains cas, la vente en ligne peut avoir un impact sur la boutique, et vice versa. Il faudra alors prendre en compte cette intrication dans le calcul de l’indemnité.
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Comment le calcul du préjudice est-il effectué ?
Le préjudice dépend principalement de la perte du fonds, c’est-à-dire des activités autorisées par le bail et exercées par le locataire.
Le preneur ne peut exercer une activité non autorisée par le bail. Dès lors toute activité hors champ contractuel ne pourra être pris en compte (outre le risque de résiliation ou de refus de renouvellement que cela pourrait opérer).
Le préjudice doit être le plus proche possible du départ du locataire. Ainsi, tant qu’il exploite et qu’il règle l’indemnité d’occupation, le chiffre d’affaires sera pris en compte. Ce, jusqu’au départ du local. C'est en effet à cette date que la valeur et la perte du fonds sont analysées.
Les résultats de l'exploitation réalisés ultérieurement au rapport d’expertise, le cas échéant, seront également réintégrés par le juge ou par l’expert, pour qu’au départ du locataire le montant indemnisé soit le plus proche possible de la réalité.
La référence aux usages de l’activité du fonds indemnisé
L'estimation du fonds à indemniser fait appel à plusieurs méthodes d’évaluation relatives aux chiffres d’affaires, et à l'examen de l’environnement considéré.
Les experts ont subi une croissance rapide. Les usages sont passés du taux sur recettes à la capitalisation de la marge brute d'autofinancement, puis à l'excédent brut d'exploitation. Aujourd’hui, il est question de la méthode par actualisation des cash-flows.
Cependant, quelle que soit la méthode retenue, l'estimation est généralement fondée sur les éléments par le chiffre d’affaires, par le taux sur recettes, par le résultat, ou par la capitalisation boursière.
Que recouvrent les indemnités accessoires ?
La seconde partie de l’article L. 145-14 du Code de commerce fait état des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur.
Cette liste n’est pas exhaustive selon la jurisprudence constante puisque l’idée de cet article est d’indemniser tout le préjudice (mais rien que le préjudice).
Ainsi, on observe que sont indemnisés les frais administratifs, de remploi, de déménagement, mais aussi le trouble commercial, l'indemnité de double loyer, la réalisation de nouveaux travaux à la suite de la perte de ceux du local dont est évincé le locataire, les frais et indemnités de licenciement.
Cependant, ces préjudices ne sont indemnisés que s’ils sont prouvés. Le locataire devra alors en apporter la preuve. Parallèlement, il est possible pour le bailleur d’invoquer ultérieurement l’absence de réinstallation du locataire pour solliciter le reversement des sommes allouées et payées.